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« Je voulais brosser un tableau panoramique du déclin de l'empire ottoman », une conversation de Gilles Kepel avec Orhan Pamuk 

Gilles and Orhan

Gilles Kepel: Votre dernier roman, Veba Geceleri (Les nuits de la peste), se déroule sur l'île fictive de Mingheria, au large de Rhodes, en Méditerranée orientale, au début du 20e siècle. Le sultan Abdul Hamid règne à Istanbul et envoie la fille de son frère récemment déchu en mission diplomatique en Chine avec son mari, un médecin et épidémiologiste formé en Europe. Alors que leur navire fait escale à Alexandrie, le médecin et sa femme sont renvoyés à Mingheria – où les premiers signes de la peste se font sentir – afin de prendre les mesures préventives adéquates pour l'enrayer.  À travers le prisme de la maladie et de ses effets globaux, vous dépeignez un moment extraordinaire au crépuscule de l'empire ottoman, où le nouveau et l'ancien monde se heurtent, où la coexistence des Turcs musulmans et des Grecs orthodoxes est gangrénée par le nationalisme, jusqu'à ce que d’autoproclamés dirigeants locaux ne déclarent leur indépendance – un exemple sanglant des régimes nationalistes qui sévissent dans la région depuis lors. 

Vous avez commencé à écrire ce roman en 2016, quatre ans avant la pandémie de Covid-19. Mais votre peste minghérienne fictive de 1901 nous frappe comme une métaphore de la pandémie que nous avons connue depuis 2020, car toutes deux exacerbent les tensions sociales, culturelles et internationales qui font basculer l'ordre mondial tel qu'il était connu à l'époque et tel qu'il est perçu aujourd'hui. Une citation des frères Goncourt – qui ont donné leur nom au fameux prix Goncourt, créé en 1902, au moment même où votre roman se déroule – semble assez bien s’y appliquer : "L’histoire est un roman qui a été ; le roman est de l’histoire qui aurait pu être." Comment situez-vous Veba Geceleri dans cette perspective ? 

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